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samedi 6 novembre 2010

Géométrie non-commutative

d’après Alpheccar
« La géométrie n’est pas faite pour être apprise, elle est faite pour être utilisée. »
      Seymour Papert
Les mathématiques fonctionnent sur deux registres complémentaires : « le visuel » qui perçoit instantanément le sens d’un théorème sur une figure géométrique, et « l’écrit » qui s’appuie sur le langage, sur une algèbre, et s’inscrit dans la durée. Selon Hermann Weyl, « l’ange de la géométrie et le diable de l’algèbre » se partagent la scène, ce qui est une bonne illustration des difficultés respectives des deux domaines.
Les travaux d’Alain Connes s’inscrivent dans la relation entre ces deux registres. Jusqu’à la découverte en 1925 de la mécanique quantique, la géométrie classique était basée sur la dualité, inaugurée par Descartes et l’introduction des coordonnées cartésiennes, entre géométrie et algèbre commutative. L’algèbre commutative, celle que nous avons tous apprise à l’école, est une algèbre dans laquelle le produit de deux quantités algébriques ne dépend pas de l’ordre de leurs termes, c’est-à-dire que A fois B est égal à B fois A.

Avec la découverte de la mécanique quantique par Heisenberg, l’espace géométrique des états d’un système microscopique, un atome par exemple, s’est enrichi de nouvelles propriétés de ses coordonnées, comme le moment et la position qui ne commutent plus. Alain Connes illustre son propos : « ce n’est pas la même chose d’ouvrir une canette de bière et de la boire, que d’essayer de la boire puis de l’ouvrir ».
Le but de la géométrie non-commutative est de généraliser la dualité entre espace géométrique et algèbre au cas plus général où l’algèbre n’est plus commutative. Cela conduit à modifier deux concepts fondamentaux des mathématiques, ceux d’espace et de symétrie, et à adapter l’ensemble des outils mathématiques, dont le calcul infinitésimal et la cohomologie à ces nouveaux paradigmes.

Présentation

Loin d’être une simple généralisation, l’intérêt initial de la théorie provient de phénomènes entièrement nouveaux et inattendus, sans contrepartie dans le cas “ classique ” commutatif. Le premier de ces phénomènes est l’apparition naturelle du « temps » à partir de la non-commutativité. Il s’agit là du résultat clé de la thèse d’Alain Connes, qui lui a permis de donner une classification des algèbres d’opérateurs, les algèbres de Von Neumann.
La géométrie riemannienne classique – commutative – qui provient de la découverte au 19ème siècle de la géométrie non-euclidienne et sert de cadre à la Relativité générale d’Einstein a été ainsi généralisée au cadre « quantique ». Les notions clé de mesure des distances et de courbure s’étendent alors au cadre non-commutatif et y acquièrent un sens nouveau.

En fait, le passage de la mesure des distances en géométrie riemannienne à la mesure des distances en géométrie non-commutative est en quelque sorte le strict reflet de l’évolution de la définition du mètre dans le système métrique (1960). La définition originale du mètre, vers la fin du XVIIIème siècle était basée sur le “ mètre des archives ” défini comme étant une fraction (1/40 000 000) de la plus grande longueur directement mesurable, à savoir la circonférence terrestre. Un changement radical s’est produit en 1960 : le mètre a été redéfini comme un multiple de la longueur d’onde d’une raie spectrale orange de l’isotope 86 du krypton. Plus récemment, en 1983, la définition actuellement en vigueur a été arrêtée, elle utilise le spectre de l’atome de césium, et s’exprime en unité de temps en utilisant la vitesse de la lumière comme facteur de conversion pour relier temps et longueur.

De la géométrie de Riemann à la géométrie non-commutative, l’évolution est parallèle à celle exposée ci-dessus pour le mètre étalon. La mesure des distances utilise les algèbres d’opérateurs. On obtient ainsi une notion d’espace géométrique de nature spectrale, d’une très grande flexibilité. La géométrie non-commutative traite à la fois d’espaces de dimension non-entière, d’espaces de dimension infinie, et surtout, d’espaces de nature “quantique”, enfin de l’espace-temps lui-même si l’on prend en compte non seulement la force électromagnétique (qui avait conduit Poincaré, Einstein et Minkowski à leur modèle d’espace-temps) mais aussi les forces faibles et fortes qui conduisent à un modèle d’espace-temps non-commutatif.

Pavage non-périodiqueDans la théorie générale des espaces non-commutatifs la notion de point se voit remplacée par celle “ d’état ” du système qui est de nature “ quantique ” et qui joue un peu le rôle de “ nuage de points ”. Néanmoins, la mesure des distances, grâce à sa formulation spectrale, continue à avoir un sens et se réduit dans le cas classique à la longueur du plus court chemin entre deux points. Cette nouvelle géométrie prolonge la géométrie de Riemann, mais chacune des notions classiques y acquiert un sens nouveau. Par exemple, la courbure d’un espace, qui joue un rôle essentiel dans la formulation des équations de la Relativité générale, continue à avoir un sens mais devient, pour un espace à quatre dimensions, le calcul de la surface de cet espace. Cela permet en particulier de reformuler de manière purement géométrique et très simple la théorie qui couple la gravitation d’Einstein avec le modèle standard des particules élémentaires.

Représentation

La géométrie non-commutative est une généralisation de la géométrie, inspirée par la physique quantique, dont le but est de pouvoir étudier des espaces aussi bizarres que l’espace de toutes les solutions d’une équation. L’idée est simple : un espace traditionnel peut être représenté par une structure algébrique commutative (ab = ba). On est capable de coder tous les outils géométriques dans cette structure algébrique. Serait-il possible de généraliser ces outils à des structures algébriques non commutatives (ab ≠ ba) qui seraient alors une description algébrique d’espaces impossibles à définir de façon traditionnelle ? On disposerait alors d’une généralisation de la notion-même d’espace géométrique.
C’est en effet possible bien que cela reste très abstrait. La géométrie non-commutative permet d’étudier des espaces comme l’espace de tous les pavages non périodiques de Penrose ou des espaces quantiques (plan quantique, sphère quantique …) qui sont des versions non-commutatives des espaces traditionnels.
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